Actes 2, 42-47 – Psaume 117 (118) – 1 Pierre 1, 3-9 – Jean 20, 19-31
Homélie du P. Michel Quesnel
Pendant les quarante jours du Carême, nous avons tenté d’observer au moins mal les consignes données par Jésus dans le Sermon sur la Montagne : pratiquer l’aumône (autrement dit : le partage), pratiquer la prière, et pratiquer le jeûne (autrement dit : la privation pour nous recentrer sur l’essentiel). Depuis dimanche dernier, nous sommes dans temps pascal, qui va durer cinquante jours jusqu’à la Pentecôte. Il est légitime de s’interroger sur les accents que nous allons donner à notre façon de vivre pendant ces sept semaines. Le passage des Actes des Apôtres qui nous a été proposé en première lecture peut nous aider. Il décrit la vie de la communauté chrétienne de Jérusalem, dans les semaines qui ont suivi la résurrection de Jésus.
Deux des accents qui ont orienté notre Carême sont présents dans le texte de Luc. Le partage se continue. Il est même intégral. Le texte précise : « Tous les croyants vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; ils vendaient leurs biens et leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous en fonction des besoins de chacun. » C’est actuellement ce qu’essaient de vivre les moines et certaines communautés religieuses. Entre gens qui vivons dans le siècle, nous n’irons pas aussi loin dans le partage, mais il est souhaitable que nous vivions une solidarité réelle entre personnes à l’aise financièrement et personnes en situation plus fragile.
Le deuxième accent commun avec la démarche de Carême est la prière. Le texte de Luc précise que « les frères… étaient assidus à la fraction du pain et aux prières ». La fraction du pain, c’est ce que nous appelons l’eucharistie. Et il annonce aussi qu’ils « fréquentaient assidûment le Temple » qui, à l’époque n’avait pas encore été détruit. A l’imitation de ce que vivait la communauté de Jérusalem, il est bien que nous consacrions du temps personnel à la prière et que nous renforcions nos temps de prière commune.
En revanche, il n’est aucunement fait allusion au jeûne ou aux privations. Cela, c’était bon pendant le Carême. « Ils sont finis, les jours de la Passion du Seigneur : vous qui célébrez avec allégresse la fête de Pâques, venez, avec son aide, prendre part en exultant aux fêtes qui s’accomplissent dans la joie de l’éternité » a proclamé le prêtre qui présidait la veillée pascale en donnant la bénédiction. Au jeûne du Carême succède, pendant le temps pascal, l’allégresse, la fête, l’exultation, la joie. C’est cela que nous avons à vivre jusqu’à la Pentecôte.
Dans le même esprit, la 1ère épître de Pierre écrit : « Aussi, vous exultez de joie !... Vous exultez d’une joie inexprimable et remplie de gloire. » Toujours dans le même esprit mais avec une tonalité différente, chaque fois que Jésus ressuscité se manifeste à un groupe de ses disciples après sa résurrection, sa première parole est : « La paix soit avec vous ! » C’est le cas, le dimanche de Pâques. C’est encore le cas, une semaine après, alors que Thomas a rejoint le groupe des disciples.
La joie, la paix, la fête. C’est cela que nous avons à vivre pendant le temps pascal, au lieu du jeûne et des privations qui ont marqué notre Carême.
Ces attitudes, elles doivent marquer l’atmosphère de nos célébrations. Ce weekend même, où nous célébrons le Dimanche de la Divine Miséricorde, une quinzaine de personnes va recevoir (ou : a reçu) le Sacrement des malades. Ce n’est pas un sacrement triste, au contraire. Il manifeste à des personnes dont la santé est fragile que Dieu les soutient de sa force et que leurs péchés sont pardonnés.
Cette attitude doit également marquer notre vie lorsque nous sommes en dehors des églises, dans nos familles, nos activités associatives ou nos activités professionnelles. Organisons des fêtes. Manifestons par les traits de notre visage que la Bonne Nouvelle de la Résurrection colore notre existence.
Saint Jean Chrysostome écrivait : « Que personne ne se lamente sur sa pauvreté : car notre commun royaume est apparu. Que personne ne se plaigne de ses péchés, car le pardon a jailli du tombeau. Que personne ne craigne la mort, car la mort du Sauveur nous a délivrés. »
Oui, frères et sœurs, alors que le spectacle du monde est fait de bruit et de fureur, mobilisons notre capacité à nous réjouir. Ici même et lorsque nous aurons quitté les murs de cette église, manifestons par notre sourire, par nos paroles et par notre esprit de fête, notre conviction qu’une nouvelle ère du monde s’est ouverte avec la résurrection de Jésus, et que la paix et la joie en sont les dominantes.
Comments