Il ne me revient pas de dire si l’ampleur des manifestations qui se sont déroulées le 1er mai était fondée ou non. Mais je puis assurer qu’en ont été victimes des personnes infiniment plus pauvres que le plus pauvre de tous les manifestants.
Le mardi 2 mai dernier, je me rends à une agence de transfert de fonds pour envoyer de l’argent à un jeune garçon lourdement handicapé physiquement, demeurant en Haïti : Haïti, l’un des pays les plus misérables de la planète ; être lourdement handicapé en Haïti, je ne vous dis pas la détresse que cela représente ! Mais avec un bon diplôme que mon aide financière lui permettra d’obtenir, ce garçon risque de pouvoir exercer un métier qui le sortira de son indigence.
Or, lorsque j’arrive devant l’agence en question, je la trouve complètement dévastée : vitres brisées et, en conséquence, fermée au public. Une personne était à l’intérieur, ramassant les débris de verre et tentant de remédier aux dégâts. Je l’interroge sur les raisons de cette situation ; elle m’explique que c’est le résultat des manifestations du 1er mai. D’autres personnes sont là, avec moi, sur le trottoir, chacune ayant au départ le projet d’envoyer un secours d’urgence à des membres de sa famille ou à des amis en situation de grande pauvreté, habitant dans des pays émergeants.
Tout comme moi, elles ne peuvent pas exécuter de transfert, et n’ont d’autre solution que reporter leur aide à plus tard… peut-être lorsque leurs parents ou leurs amis seront morts de faim ou de maladie ; dans ces pays-là, on ne mange pas à sa faim tous les jours, et les soins médicaux sont payants.
Bravo, Messieurs les casseurs ! Je ne sais si vous vous rendez compte des drames que vous avez provoqués. Peut-être êtes vous en situation fragile. Mais êtes-vous conscients que vous avez fait un grand tort à des personnes beaucoup plus fragiles que vous ?
Si nous sortions de notre bulle, le monde serait sans doute plus harmonieux.
Michel Quesnel
Prêtre à Saint-Bonaventure et à la chapelle de l’Hôtel-Dieu
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